Pour JVMag, j’ai eu le privilège d’être accrédité pour assister à la cérémonie de remise du Prix du Cinéma Suisse. Événement qui a eu lieu ce vendredi 21 mars au Bâtiment des Forces Motrices à Genève. Je vous propose ici un petit récit de ma soirée.
Quartz d’heure de gloire
Il est environ 23 heures, je me dépêche de rejoindre la gare pour chopper un train. Derrière moi, on entend encore distinctement la musique en provenance du BFM. L’after bat son plein, mais j’ai décidé d’être raisonnable. Je me retourne une dernière fois pour contempler les lumières se reflétant sur la rivière. Une douce brise du printemps naissant permet de s’attarder un peu à regarder ce bâtiment qui semble flotter au milieu du Rhône.

Dès mon arrivée, vers 18:00, j’ai plongé dans un monde qui ne m’est pas totalement étranger, mais pas non plus totalement familier: Le monde du cinéma suisse. Après avoir récupéré mon accréditation, je me garde bien de fouler le tapis rouge. Cependant, je ne boude pas l’occasion de voir l’industrie du cinéma sur son 31 pour son auto-célébration. Sans me prétendre un connaisseur de la mode, nous avions quand même à faire à de belles toilettes. Néanmoins, je reconnais une retenue, loin du faste des grandes cérémonies du cinéma ou de la culture outre-Atlantique. Je m’étonne de ne pas voir un Quartz sous cloche, afin de pouvoir contempler ou prendre en photo le trophée. Vous devrez vous contenter d’une image officielle.
Autre caractéristique d’un événement national, la diversité linguistique, que cela soit lors de la cérémonie ou en « off ». J’avais heureusement le sentiment de ne pas être le seul à ne pas maîtriser la langue de Fritz Lang, ou ses dialectes suisses. Après un apéro qui permettait surtout à chacun et chacune de passer sur le tapis rouge et de se préparer à la cérémonie, je me suis assis dans la salle plongée dans une lumière bleue. Au début de la cérémonie, il ne restait plus beaucoup de places libres, ce qui me fait dire que nous étions environ 900 personnes.
Karpi, c’est fini!
La cérémonie est présentée par Licia Chery (que vous avez peut-être déjà vu sur la RTS) et par Karpi (Patrick Karpiczenko, un humoriste, scénariste, réalisateur et producteur de cinéma suisse plutôt connu chez nos amis de l’autre côté du Röstigraben). Sous une forme de duo comique plutôt efficace, chacun parle dans sa langue et fait rire une partie ou une autre de la salle. On reconnait vite les bilingues. Ces petits sketchs sont l’occasion de rappeler, par exemple, que la cérémonie n’est pas retransmise cette année à la TV. Qui plus est, la plupart des films nominés ne sont pas des films qui ont beaucoup attirer en salle.
On pourrait d’ailleurs toujours reprocher ce schisme entre le cinéma et la TV ou les plateformes. Heureusement, le prix de la meilleure interprétation masculine sera remis plus tard dans la soirée par Cyril Metzger, vu notamment dans Winter Palace la première grande série Netflix suisse. Cyril évoque une anecdote de tournage en France où un autre acteur a été surpris d’apprendre que la Suisse avait son propre prix. Toujours aussi pédants ces Français… L’acteur en profitera d’ailleurs pour signalé, avec humilité, que ceux qui ont du talent sont dans la salle à attendre d’entendre leur nom, plutôt que sur scène comme lui à présenté le prix. Pour ce prix d’ailleurs, l’Académie n’a pas su départagé les deux gagnants David Constantin (Bax dans Tschugger – der Lätscht fall) et Dimitri Krebs (Ernst Schrämli dans Landesverräter).
Une cérémonie pleine d’émotion
Dans les autres moments forts de cette cérémonie de remise du Prix du Cinéma Suisse, nous devons citer le prix d’honneur remis à Bulle Ogier et Barbet Schroeder pour leur contribution au cinéma suisse. Un moment d’émotions et un « standing ovation » pour deux grands artistes de la Nouvelle Vague. L’Académie du Cinéma Suisse a aussi souhaité, lors d’une sorte de happening un peu confus, remettre un prix du public pour Bon Schuur Ticino, qui a su attirer de très nombreux spectateurs dans les salles suisses en 2024.
Le Prix spécial de l’Académie, remis au cascadeur de renommée internationale Oliver Keller, aura été l’occasion d’une démonstration plutôt impressionnante de ses compétences. Oliver a traversé la scène en feu, avant de revenir pour prendre son prix, encore couvert de liquide inflammable. Si ça c’est pas de l’expérience et du spectacle!
Dans les moments un peu moins joyeux, plusieurs intervenants et intervenantes ont mentionné l’importance du financement pour réaliser tous ces films, alors que les financements publics ont plutôt tendance à s’amenuiser, et que les financements privés sont devenus frileux dans une période économique et politique un peu troublée par la situation du monde.
Après une cérémonie de deux heures, qui a su garder son rythme et ne pas devenir trop ennuyante ou auto-centrée, j’ai pu profiter du souper et échanger avec quelques connaissances, avant que le dancefloor et l’after show ne débute.
Cette cérémonie a su montrer encore une fois les qualités intrinsèques du cinéma suisse, notamment son ouverture évidente sur le monde à la vue des films qui ont pu remporter des prix. On peut néanmoins déplorer que le cinéma suisse plus populaire, ou les productions audiovisuelles pour la TV ou les plateformes, n’aient pas encore leur place dans ce genre d’événement.
Nous vous laissons avec ce court film, produit par les organisateurs de l’événement. Celui-ci résume assez bien les moments forts de la soirée.
Liste des gagnants et gagnantes du Prix du Cinéma Suisse 2025
- Meilleur film de fiction : REINAS de Klaudia Reynicke (Alva Film Sàrl, Britta Rindelaub, Thomas Reichlin)
- Meilleur documentaire : WIR ERBEN de Simon Baumann (Balzli & Fahrer GmbH, Dieter Fahrer)
- Meilleur court métrage : LAS NOVIAS DEL SUR de Elena Lopez Riera (Alina film Sàrl, Eugenia Mumenthaler, David Epiney)
- Meilleur film d’animation : SANS VOIX de Samuel Patthey (DOK MOBILE S.A., Mark Olexa)
- Meilleure interprétation féminine : Laetitia Dosch (Avril) dans Le procès du chien
- Meilleure interprétation masculine : David Constantin (Bax) dans Tschugger – der Lätscht fall et Dimitri Krebs (Ernst Schrämli) dans Landesverräter
- Meilleure interprétation dans un second rôle : Rachel Braunschweig (Ema Gmür) dans Friedas Fall
- Meilleur scénario : Ramon Zürcher Der Spatz im Kamin
- Meilleure musique de film : Marcel Vaid – Les Paradis de Diane
- Meilleure photographie : Gabriel Sandru – Electric Child
- Meilleur montage : Kevin Schlosser – Riverboom
- Meilleure son : Ramon Zürcher, Peter von Siebenthal et Balthasar Jucker – Der Spatz im Kamin
- Meilleur film de diplôme : MAMAN DANSE de Mégane Brügger (Ecole cantonale d’art de Lausanne)
- Prix spécial de l’Académie : Oliver Keller (cascadeur)
- Prix d’honneur : Bulle Ogier et Barbet Schroeder
Sources: https://www.bak.admin.ch/bak/fr/home/actualites/nsb-news.msg-id-104570.html et communiqué de presse