Herdling, la transhumance vidéoludique proposée par le studio suisse Okomotive, est le troisième jeu du studio après FAR: Lone Sails (2018), FAR: Changing Tides (2022). Est-ce que le voyage en vaut le détour ?
Les œuvres d’Okomotive ont toujours porté une importance à la musique, et Herdling ne déroge pas à la règle avec Joel Schoch toujours à la composition. Pour accompagner la lecture de ce test, nous vous proposons donc d’écouter un peu l’OST grâce au lecteur Bandcamp intégré ci-dessous.
Tout commence de nuit, sous un pont routier, dans une ville un peu grise et sale. Si je voulais être taquin, je pourrais suggérer qu’Okomotive s’est inspiré de Zürich, où le studio est basé. Notre protagoniste, ado visiblement sans-abri, se réveille suite à un bruit d’accident de la route. Le jeu nous invite alors à aller voir ce qui se passe.

Au coin de la rue, on aperçoit un animal cornu qui fait 2 fois notre taille. L’animal ne ressemble à rien de connu, mais il a réussi à coincer sa tête dans un seau. Après l’avoir aidé, le jeu nous propose de « dompter le calicorne ». Cette créature, qui évoque le bélier ou le bison, est donc un calicorne, qui semble être un mot valise combinant corne et calico, le type de pelage tricolore chez les chats. Au moment de dompter l’animal, le jeu nous propose de le nommer ou de générer un prénom aléatoire.
Et on voit venir le truc: dès qu’on commence à donner des prénoms, on commence à s’attacher! C’est bien l’objectif du studio: qu’on se sente responsable de notre troupeau, ou plutôt, pour être précis, de notre harde. Comme le disait si bien le renard au Petit Prince d’Antoine de Saint-Exupéry : « Tu deviens responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé. »
Inalpe we trust
Une fois notre premier calicorne dompté, la mécanique centrale de Herdling se déploie: guider la harde. En se plaçant derrière les calicornes, un faisceau de particules apparait à l’opposé, devant nos chères amies les bêtes. En appuyant sur R2 (sur PS5), notre protagoniste donne l’instruction au troupeau de se rendre à ce point. À la manière d’un border collie, si nous nous plaçons sur la gauche, nous allons guider le troupeau vers la droite et réciproquement. La manœuvre n’est pas toujours très intuitive, et on a parfois l’impression d’avoir les contrôles inversés, comme dans certains jeux qui inversent l’axe horizontal quand on pilote un avion par exemple. L’interface utilisateur est très minimale et le restera pour le reste du jeu.
À travers des puzzles très simples, nous allons pouvoir progresser dans la ville, et dompter d’autres calicornes, puis l’on arrive en bordure de la ville. Et là, notre objectif s’offre à nous: la montagne. Et l’on comprend vite que nous allons devoir guider les calicornes jusqu’au sommet, pour les ramener « chez eux ». La tradition alpine de l’inalpe vient alors à l’esprit, d’autant plus venant d’un studio suisse.
Après une séquence plutôt exploration et guidage dans la ville, le jeu propose alors une nouvelle séquence: en ramassant des fleurs bleues dans un pâturage, l’on « charge » la jauge de cavalcade. En déclenchant la cavalcade, notre harde se met au galop, avec la musique qui décide aussi de se faire bien plus présente.
Là encore, il faut prendre le coup de main pour réussir à diriger le groupe qui va beaucoup plus vite et toujours avec les contrôles « inversés ». Ces moments, initialement plutôt des moments de liberté et grâce, prendront progressivement plus d’enjeux.
Calicornication
Après avoir gambadé dans les champs « tout schuss » et avoir tenté de dépasser un train, l’on se retrouve dans une zone industrielle désaffectée où, comme en ville, nous allons devoir résoudre des petits puzzles et dompter de nouveaux calicornes pour agrandir notre harde. Puis viens une phase plus tranquille, où l’on doit trouver du bois pour faire un feu et s’occuper de nos calicornes (nettoyage, caresses, jeux, nourrir) dans une sorte de rituel du coucher afin que chacun soit satisfait et aille s’installer auprès du feu avant que l’on se couche. Ces interactions restent facultatives, mais difficile d’y résister devant tant de « mignonneté ».
Sans en dévoiler trop, le jeu ne proposera pas forcément bien plus de nouvelles mécaniques de jeu, sauf de guider la harde pour éviter des obstacles dangereux qui pourraient blesser les calicornes. Il y a heureusement régulièrement des arbustes dont les fruits permettent de rendre de la vie à vos compagnons. Je tiens à dire d’ailleurs qu’il est possible de finir le jeu sans perdre un seul membre de notre harde, et bien que le jeu puisse les mettre en péril, il y a toujours plus occasion d’éviter la perte d’un calicorne.
Les calicornes sont magnifiques, avec leurs cornes uniques qui prennent d’ailleurs des couleurs dans certaines conditions. On peut, au fil du voyage, ramasser des ornements et harnais et « habiller » les créatures, et ainsi les préparer pour le mode photo.
Herdling, quelle belle Journey!
À part quelques soucis de performance dans le dernier tiers du jeu, que nous espérons corrigés à la sortie, la technique est maitrisée. Il y a un petit côté Dreams dans le rendu graphique « pelucheux » qui sied parfaitement aux poils des bestioles. Et il faut qu’on parle des temps de chargement! Quand on revient dans une partie après avoir quitté le jeu, il ne faut même pas 2 secondes pour charger une sauvegarde, ce qui rappelle aussi les temps de chargement très courts de Dreams. De même, le jeu ne pèse que 2,66 Go sur ma PS5. J’en viens à me demander si Okomotive n’a pas profité de ce projet pour travailler sur des éléments techniques pour de futurs projets.
Brève balade pastorale
Après 3-4 heures de jeu, mon voyage avec Herdling est arrivé à son terme, et cette expérience m’a fait penser à plusieurs jeux: The Last Guardian tout d’abord, pour la coopération avec des animaux ; également Journey pour le côté contemplatif et l’ascension vers les montagnes. Des influences assumées par le studio, comme indiqué dans l’entretien réalisé avec nos confrères de Gamatomic que nous vous invitons à aller lire. La bande originale et le soin à la direction artistique, ainsi que la proposition de gameplay, font en effet fortement penser au succès du jeu de thatgamecompany de 2012. Néanmoins, le jeu n’a pas réussi à me saisir autant que Journey avait pu le faire.
En ayant la responsabilité de la harde, et avec une mécanique de guidage simple mais relativement exigeante, ma concentration ne m’a pas permis de m’abandonner au jeu comme je pourrais le faire sur d’autres expériences de ce genre. Est-ce que mes goûts ont changé ou est-ce que Herdling n’a pas su trouver la formule juste? La présence du jeu dans le Game Pass permettra aux abonné·es de pouvoir en profiter sans passer par un prix de lancement un peu abrupt.
Herdling sait nous guider par sa direction artistique et sa bande originale. Le voyage est court et atmosphérique, mais assez captivant pour qu’on en souhaite plus. En tant que berger, ce sont finalement les calicornes, nos compagnons à quatre pattes, qui nous font apprécier cette transhumance. En se présentant comme l’héritier helvétique de Journey, Herdling se rapproche des sommets, sans les atteindre.
Herdling, un bref hymne helvétique à la transhumance qui manque un peu de hauteur.
Note générale : 7 / 10
J’ai aimé :
- Les calicornes
- La bande originale
- La direction artistique
J’ai moins aimé :
- Le prix de lancement de 25.-
- Un gameplay qui reste très simple
C’est plutôt pour toi si…
- Tu as aimé Journey et les jeux FAR du studio
- Tu aimes les jeux avec des animaux
Ce n’est plutôt pas pour toi si…
- Tu n’aimes pas les jeux courts
- Tu aimes les jeux avec un gameplay riche
Herdling
Studio: Okomotive (Suisse)
Éditeur: Panic (USA)
Date de sortie: 21 août 2025, disponible dans le Xbox Game Pass à sa sortie
Classification: PEGI 12
Prix: Autour de CHF 23.-, avec un rabais de 20% de lancement
Moteur graphique: Unity Engine
Plateformes: Steam, PlayStation 5, Xbox Series X|S, Xbox Game Pass, Nintendo Switch, Epic Games Store
Conditions du test: clef PS5 mise à disposition par l’éditeur