Alors que nombre d’entre vous sont certainement en train de parcourir les Terres Interdites, nous avons combattu des milliers d’ennemis pour assister au couronnement du nouvel empereur des Musō : Dynasty Warriors Origins.
« Ce qui fut longtemps divisé doit assurément, un jour, retrouver son unité. Et ce qui, longtemps, fut uni, doit un jour, fatalement, se diviser à nouveau. »
— Les Trois Royaumes, Luó Guànzhōng

C’est sur ces phrases que s’ouvre Les Trois Royaumes, le livre chinois du XVe siècle qui relate, de manière romancée, la période des Trois Royaumes de la Chine antique (IIᵉ siècle – IIIᵉ siècle apr. J.-C.). L’ouvrage fait partie des incontournables de la littérature chinoise et constitue une œuvre militaire et historique majeure. Avec ses personnages hauts en couleur, ses intrigues politiques et ses grandes batailles, ce récit marquant est digne des grandes épopées ou tragédies shakespeariennes. Pour celles et ceux qui ne connaîtraient pas leurs classiques, on peut également faire le parallèle avec Game of Thrones.
Dès ses premières années d’existence, la société japonaise Koei s’est attachée à produire et publier des jeux de simulation historique. Notamment en 1985 avec Romance of the Three Kingdoms qui s’inspire de la période des Trois Royaumes. En 2000, le studio Omega Force, interne à Koei, lance Dynasty Warriors 2, un beat them all/hack and slash qui donne vie aux batailles de grande envergure de la période des Trois Royaumes, et qui sera fondateur pour le genre Musō qui nous accompagne donc depuis 25 ans.
Maintenant que nous vous avons posé un peu le décor littéraire et vidéoludique de la série, nous allons pouvoir nous jeter dans la mêlée.
Il faut trouver la Voie!

D’emblée, Dynasty Warriors: Origins rompt avec l’une des traditions de la série. Nous n’incarnons par l’un des très nombreux personnages emblématiques de l’époque, mais un personnage amnésique et relativement mutique, ce qui est bien pratique même si un peu cliché. On peut nommer notre personnage, mais pas plus de personnalisation. Le jeu ne permettra d’ailleurs pas de vraiment faire évoluer son apparence, sauf quelques costumes en bonus de précommande ou DLC.
Cela n’empêche pas notre avatar, le Voyageur, d’avoir une certaine classe. Mais pour les fans de la série, qui aiment incarner les officiers ou généraux habituels, ce sera certainement une petite déception. Gageons que le reste de la proposition arrivera à faire accepter ce léger désagrément.
Aux commandes de notre Voyageur, nous nous retrouvons rapidement confrontés aux Turbans Jaunes, un mouvement de rébellion contre la dynastie Han et menaçant la cohésion de l’Empire. Malgré nous, nous nous retrouvons embarqués dans diverses batailles pour éliminer les Turbans Jaunes, et nous faisons ainsi la connaissance de quelques-uns des personnages clefs de l’intrigue. Suite à cette rébellion, l’équilibre de l’Empire va tanguer, et les appétits des différents gouverneurs et officiers vont s’aiguiser pour dominer la Chine toute entière.

On comprend aussi rapidement que le choix de ce personnage mystérieux (et non canonique) permet d’éviter les incohérences narratives qui pourraient surgir si nous contrôlions un personnage historique. Cela permet à l’histoire de se dérouler de la manière la plus « fidèle » en faisant intervenir tous les personnages du récit « classique ». Notre beau brun ténébreux se retrouve alors tel une petite souris, plutôt spectateur durant les cinématiques.
Nous ne nous étendrons d’ailleurs pas tellement sur cette intrigue efficace et classique que nous avons apprécié suivre à travers les petites cinématiques qui entrecoupent les phases plus belliqueuses et qui permettent de développer les différents personnages que nous retrouvons sur le champ de bataille. Et bien que nous puissions en théorie faire des choix de dialogues, ceux-ci sont absolument inutiles et ne constituent pas de réels choix. C’est dommage, on aurait préféré ne pas avoir de choix et que notre personnage soit doublé comme le reste du cast. Signalons aussi la taille des sous-titres trop petite pour notre setup (canapé dans le salon devant la TV 4K).
Un petit mot également sur le doublage, vu que nous sommes sur le sujet des séquences cinématiques: le doublage en anglais est absolument kitsch, comme c’est la tradition dans la série, et nous avons donc choisi le doublage en japonais, plutôt de qualité. Malheureusement, sur PS5 et en Occident, il n’était pas possible de choisir le doublage en chinois, qui aurait permis d’être plus cohérent avec le sujet du jeu.
Il est arrivé de Chine à pied
En termes de phases de jeu, Dynasty Warriors: Origins propose aussi un « overworld », ce qui est décidément très à la mode en ce moment. Nous y promenons notre Voyageur (aux proportions surréelles) sur une carte de la Chine et nous avons pas mal de choses à y faire.

Premièrement, il est possible de vous rendre de ville en ville. Les villes ne proposent rien d’autre qu’un menu pour aller à l’auberge ou visiter la boutique. L’auberge permet surtout de lire des lettres que nous recevons, celles-ci permettent d’enrichir un peu plus l’univers du jeu, mais elles permettent surtout de débloquer des objets ou des missions ou rencontres sur la carte.
C’est également à l’auberge que l’on améliore nos cinq gemmes à partir du pyroxène que l’on collecte sur la carte. Une seule gemme peut être équipée et procure des petits bonus (par exemple augmenter de 12% la chance de bloquer une attaque).
La carte permet aussi de lancer les phases de combat, que cela soit les grandes batailles de longue haleine qui sont directement liées à l’avancement de l’histoire principale, et qui reprenne les grandes batailles historiques de la période, mais aussi des escarmouches ou missions annexes qui se terminent rapidement et qui sont très utiles pour prendre de l’expérience et de l’argent, ou encore tester de nouvelles compétences ou armes.
Enfin, la carte permet de lancer certaines séquences cinématiques plus intimes, qui permettent en général de développer l’affinité avec un autre personnage, ce qui permet de débloquer certains équipements ou points de talent. Les officiers peuvent également vous donner des objectifs d’entraînements à remplir (ex: tuer 200 ennemis avec telle arme) pour obtenir des points de talent.
L’Œil du tigre
La Chine, c’est grand, et heureusement, le jeu propose rapidement d’avoir un cheval pour se promener un peu plus vite sur la carte, et il existe aussi des balises qui permettent le voyage rapide. Notre cheval sera aussi central lors des phases de combat, où nous devrons très régulièrement nous déplacer rapidement sur le champ de bataille pour réagir à la situation.

Et le champ de bataille, ça sera bien sûr le cœur de Dynasty Warriors: Origins. Là aussi, le jeu apporte son lot de nouveautés plus que bienvenues dans une série qui commençait à s’enliser et à perdre son public.
Afin de terrasser ses ennemis, notre Voyageur dispose de nombreux Arts de combat, qui consomment de la Bravoure qui augmente en attaquant les ennemis. Nous pouvons aussi bloquer les attaques ou les esquiver, ce qui permet aussi, avec le bon timing de réaliser des contre-attaques. Bien que la plupart de nos ennemis soit du menu fretin que nous éliminons par dizaines, les officiers ou généraux ennemis constituent les véritables antagonistes lors des combats. Ceux-ci font preuve de « Résolution », qui se traduit par des « boucliers » que nous devons briser pour les étourdir. Une mécanique désormais bien connue qui permet ensuite de réaliser une attaque spéciale, appelée ici « Assaut ». Le niveau de résolution sera dépendant du moral des troupes, concept sur lequel nous revenons un peu plus bas.

En termes de progression, nous commençons le jeu avec deux armes pour en obtenir jusqu’à neuf au total en battant des officiers ou généraux lors des batailles. C’est d’ailleurs surtout sur le champ de bataille que l’on obtiendra de meilleures armes. Par ailleurs, plus nous utilisons une arme, plus nous débloquons des nouveaux arts pour celle-ci. L’équipement est d’ailleurs modifiable en pleine bataille.
L’arsenal ne se limite pas là. Nous avons bien sûr la super attaque Musō qui utilise une jauge qui se remplit en battant les ennemis. Cette même jauge permet également de rentrer en mode Furie où l’on devient temporairement invincible et où l’on peut utiliser la barre de Musō pour les arts, ce qui permet de faire bien plus de dégâts. Une sorte de mode divin plutôt impressionnant et épique qui se termine d’ailleurs par une mega attaque Musō, et qui peut changer le cours d’une bataille si bien utilisée.
Enfin, la progression de notre personnage est régie par des arbres de compétences qui se débloquent au cours de la partie, en fonction du niveau de rang. Dans ces arbres, il est possible de dépenser les points de talent que nous avons collectés en combat ou en remplissant des missions et des entraînements.

Il resterait de nombreuses mécaniques à vous expliquer, tant le jeu est généreux sur cet aspect là, mais également bien dosé pour les introduire progressivement. Mais Dynasty Warriors ce n’est pas que du combat, mais aussi de la stratégie.
Un homme planifie. Le ciel décide du résultat.
Ce qui rend les Musō dynamiques n’est pas seulement leur côté action, mais surtout la dimension stratégique des batailles. En effet, chaque bataille commence par un conseil de guerre où un plan d’attaque bein établi, plan qui devra de toute manière changer en cours de partie car rien ne se passe jamais comme prévu.
Sur le champ de bataille, les exploits individuels sont finalement secondaires face au succès collectif. La victoire ne pourra s’acquérir qu’en gardant un œil sur nos alliés et sur le déroulement de la bataille. Il faudra voler aux secours de nos alliés en détresse, mais aussi conquérir les bases ennemies pour renforcer le moral de notre armée. Le moral des troupes sera essentiel pour faire basculer les événements en notre faveur et aura un impact direct sur la résolution et la résistance des troupes ennemies. Ceci explique d’ailleurs l’importance de la carte qui est toujours présente en bas à droite de l’écran et qui fournit beaucoup d’informations sur la bataille en cours.
Ce niveau stratégique impose donc à notre Voyageur de se déplacer énormément sur les cartes et d’identifier à la fois les objectifs, mais également les risques à l’instant T. Il est parfois possible de déclencher des charges ou des embuscades, dévastatrices pour l’armée adverse. Cette couche de stratégie permet au jeu de ne pas se résumer à un bête « hack and slash » et procure une profondeur qui permet de rendre le jeu bien plus dynamique et exigeant.
Il est d’ailleurs possible de « recréer le champ de bataille » pour comprendre les raisons d’une défaite, mais également de revenir à des moments clefs de la bataille, comme des checkpoints, plutôt que de refaire l’ensemble de la bataille. Mécanique utile car il est parfois possible de faire une erreur stratégique alors que la bataille est déjà bien entamée.

Dans les phases de bataille entre Grandes Armées, où le moteur graphique maison Katana montre toute sa capacité à afficher des millions de personnages, le jeu arrive à retranscrire le bruit et la fureur de la guerre comme peu d’autres jeux arrivent à le faire. Surtout que la musique rock/métal, si caractéristique de la série, amplifie ce caractère épique.
Dynasty Warriors: Origins, le retour du roi
Nous pourrions encore parler des heures de Dynasty Warriors: Origins. Avec une durée de vie d’environ 40 heures, ce Musō se permet d’être généreux mais accessible, tout en redynamisant les combats et la stratégie des batailles. Longtemps dépassée techniquement, la série se voit enfin dotée d’un écrin digne de son long héritage. Les quelques ombres au tableau n’empêchent pas le studio Omega Force d’établir la nouvelle référence du genre qu’il a lui-même créer il y a 25 ans. Les fans, longtemps divisés, peuvent maintenant s’unir!
Note générale: 9 / 10
Les + :
– Ampleur des batailles et taille des armées
– Richesse des systèmes de jeux
– Performances et moteur graphique qui tiennent la route
– Évolutions du système de combat
Les – :
– Protagoniste muet et non personnalisable
– Choix dans les dialogues inutiles
– Doublage chinois pas disponible sur PS5
– Sous-titres trop petits
– Pas de multijoueur, ni local ni en ligne
Dynasty Warriors: Origins
Studio: Omega Force (Japon)
Éditeur: Koei Tecmo (Japon)
Date de sortie: 17 janvier 2025
Prix: Autour de CHF 70.- à sa sortie
Moteur graphique: Katana Engine (moteur propriétaire de Koei Tecmo)
Plateformes: PlayStation 5, Xbox Series X/S, PC
Conditions du test: testé sur PS5 à partir d’une clef mise à disposition par l’éditeur